Sofja Iwanowna Schkatula

née en 1926 en Crimée


1943–1945 à Ravensbrück

« DÈS APRÈS LA LIBÉRATION, J’AI DÉCIDÉ D’OUBLIER LE CAMP DE CONCENTRATION ET DE TOUT DÉFINITIVEMENT RÉPUDIER DE MA MÉMOIRE. JE NE PENSAIS PAS QU’APRÈS SOIXANTE ANS QUELQU’UN M’EN PARLERAIT. »

En 1942, Sofija Iwanowna a été déportée de Crimée vers l’Allemagne pour des travaux forcés. La jeune fille est arrivée dans un camp de travail près de Francfort. Puis, après que l’usine a été bombardée par les Anglo- Américains, elle a été déplacée dans un autre camp de travail. De là, Sofija Iwanowna a été intégrée dans le circuit économique. Mais, après trois mois, ils l’ont renvoyée dans le camp près de Francfort. Les conditions de vie s’étaient considérablement dégradées. Voilà pourquoi une fois elle a refusé de dîner avec d’autres en signe de protestation. Les travailleurs ont été punis et elle est arrivée à la prison de Francfort. Un jugement a eu lieu et suite à son verdict, elle s’est retrouvée à Ravensbrück.

C’est en 1945 qu’elle a été libérée. Sofija Iwanowna a travaillé huit mois dans une unité de l’armée soviétique en charge de l’approvisionnement en matériel. En décembre de cette même année, elle est revenue chez elle en Crimée, où elle vit encore aujourd’hui.

Sa fille Liudmila dit de Sofija Schkatula : « Ma mère n’aime pas parler de ce qu’a signifié Ravensbrück dans sa vie. Je ne l’ai appris de sa bouche pour la première fois que par hasard, entre 10 et 12 ans. Elle rêvait chaque nuit des “chiens” du camp. Depuis cette époque, je m’en suis occupée comme je l’ai pu. »

Les détenues n’ont jamais totalement vaincu Ravensbrück et ses horreurs. Par la force de leur volonté, elles ont retenu leur colère et leur rancœur qu’elles ne manifestaient pas et étouffaient en elles. Leurs forces s’étiolaient chaque jour et elles étaient de moins en moins nombreuses.

On disait de ma mère qu’elle avait eu au moins deux anges gardiens. Je pense que le troisième a été sa mère qui, par sa sagesse, sa bonté et sa patience a protégé tous ses enfants contre les souffrances pendant la guerre et contre la faim et le froid dans la période non moins difficile de l’après-guerre. C’est justement sous ses « ailes » que ma mère voulait être quand elle était au camp.

 

Natalia Timofeewa
Russie
Amie de Madamme Schkatula